EMC-Gynécologie Obstétrique 2 (2005) 227–237
Petits maux de la grossesse Discomfort during pregnancy J.-M. Thoulon * Professeur honoraire de gynécologie obstétrique, Université Cl. Bernard Lyon I, 14, rue Duviard,69004 Lyon, FranceMOTS CLÉS Résumé Entre 45 et 89 % des femmes enceintes ont des nausées et des vomissements. Le
traitement est diététique (boissons légères, aliments n’entraînant pas de dégoût, 4 à
6 repas par jour). La pyridoxine (750 mg/j) est plus efficace sur les vomissements que sur
les nausées. Les antiémétiques (métopimazine, métoclopramide) sont plus ou moins
efficaces ; certains conseillent l’homéopathie ou l’acupuncture (point Neiguan). La
persistance des vomissements après 14 semaines d’aménorrhée fait rechercher une cause
psychologique ou organique. Le traitement du ptyalisme est inefficace. Le traitement de
la constipation est d’abord diététique (fruits, légumes crus et cuits à chaque repas) ; le
lactulose, l’huile de paraffine et les mucilages (ispaghul) ou le macrogol sont prescrits
ensuite. Le pyrosis survient en fin de grossesse, en décubitus dorsal et la nuit : les
alginates sont prescrits en premier et si échec la ranitidine ou l’oméprazole. Si les signespersistent une œsophagoscopie pourra détecter une œsophagite ou une hernie hiatale. Les crampes nocturnes sont douloureuses : le traitement de fond est le magnésium donnéen cure de 2 à 3 semaines. La quinine (150 à 300 mg par prise) est un traitementsymptomatique, elle n’est pas contre-indiquée. Le relâchement douloureux de la sym-physe n’a pas de traitement efficace ; il guérit spontanément dans le post-partum. Leslombalgies sont traitées par des postures réduisant la lordose lombaire : les antalgiquessont inefficaces. Les massages locaux ou par jet d’eau les atténuent. La rhinite congestiveest traitée par des antihistaminiques : les vasoconstricteurs locaux sont contre-indiqués. Les gingivites hypertrophiques sont traitées par une hygiène buccale substituant aubrossage l’emploi de jets dentaires. L’épulis est rare et une intervention locale estrarement indiquée, sauf si les saignements sont importants. Les vergetures sont fréquen-tes : leur traitement est peu efficace : emploi de laits et crèmes hydratantes en massagelocal, corrigeant la sécheresse cutanée habituelle. 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Abstract 45% to 89% of pregnant women experience nausea and vomiting. The treatment
is nutritional (well accepted food, 4 to 6 meals per day). Pyridoxine (750 mg/day) is more
effective on vomiting than on nausea. Antiemetic drugs (metopimazine, metoclopramide)
are more or less efficient; some authors recommend homeopathic drugs or acupuncture.
Persistent vomiting after 14 amenorrhea weeks suggests a psychological or an organic
cause. There is no effective treatment for ptyalism. Constipation is first treated with an
appropriate diet (fruits and both fresh and cooked vegetables for each meal); lactulose,
vaseline oil and mucilage (ispaghul) or macrogol can then be used. Pyrosis occurs in late
Adresse e-mail : jmthoulon@wanadoo.fr (J.-M. Thoulon).
1762-6145/$ - see front matter 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi: 10.1016/j.emcgo.2005.07.001
pregnancy, mainly when lying on the back and during night time: alginates are first
prescribed and if they are not efficient enough, ranitidine or omeprazole can be used. In
case of persistent pyrosis, oesophagoscopy may help detecting oesophagitis or hiatalhernia. Night cramps are highly painful: basic treatment is magnesium supplements for2 to 3 weeks. Quinine (150 to 300 mg per dosing) is a symptomatic treatment and is notcontraindicated. There is no effective treatment for the pelvic girdle relaxation thatspontaneously recovers post partum. Lumbosacral pain is treated by lumbar lordosereduction: antalgesic drugs are not efficient. Massages and hydrotherapy reduce suchpain. The treatment of congestive rhinitis is based on antihistaminic drugs: local vaso-constrictive drugs are contraindicated. In hypertrophic gingivitis, tooth brushing shouldbe replaced by hydrojet. Epulis is uncommon and rarely requires surgery, except inabundant bleeding. Striae albae are common and there is no really effective treatment;moisturizing milks and creams can be applied to reduce dry skin. 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Introduction
dotrophine chorionique (hCG) a été incriminée dansla genèse des nausées et L’aug-
Rares sont les femmes enceintes ne subissant pas
mentation du taux d’œstrogènes circulants est res-
ces petits maux, qui leur rendent la grossesse in-
ponsable des nausées et de l’hypotonie veineuse
confortable. Traiter la mère c’est aussi administrer
des membres inférieurs : la pression veineuse et
un traitement au fœtus dans une période où il est
capillaire augmente (lourdeurs des jambes, vari-
très vulnérable (traitement des nausées, vomisse-
ces), ceci est aggravé par la position debout et peut
ments) : le spectre de la malformation et les exi-
provoquer une ischémie relative musculaire (qui
gences de la loi Huriet ont finalement bloqué en
pour certains est responsable des crampes).
France les tentatives thérapeutiques. Il est difficile
Malgré des modifications métaboliques impor-
de trouver des traitements comparés à un placebo
tantes, une déficience phosphocalcique n’a jamais
et répondant aux critères d’efficacité exigés ac-
pu être démontrée. Un déficit en magnésium a été
invoqué dans la genèse des crampes : mais lesdosages de magnésémie et de la calcémie sont peureprésentatifs de ces ions au stockage surtout intra-
Modifications gravidiques physiologiques
L’équilibre postural de la femme enceinte est
Adaptation des fonctions digestives
modifié du fait du poids de l’utérus gravide, surtout
Elle est très importante dès le début de la gros-
dans les 3 derniers mois. Le centre de gravité est
sesse. Chez la rate, le volume du pancréas aug-
déporté en avant : le rétablissement de l’équilibre
et les capacités d’absorption liées à une
se fait par une bascule en arrière du tronc avec une
surface villositaire intestinale accrue et au ralentis-
exagération de la lordose lombaire source de lom-
balgies, voire de lombosciatique. Les « ramollisse-
de l’absorption digestive pendant la grossesse chez
ments ligamentaires » peuvent générer une hyper-
les femmes ayant un grêle court (naturellement ou
laxité au niveau de plusieurs articulations : liaison
après résection) est en faveur d’un mécanisme
intervertébrale, symphyse pubienne, articulation
semblable : la concentration sanguine de la gas-
sacro-iliaque. Ceci déstabilise la marche (marche
trine, de la cholécystokinine augmente aussi. Ceci
en canard), mobilise anormalement la symphyse
paraît paradoxal : en effet les motilités vésiculaire
et intestinale diminuent. La vidange gastrique et le
nerf sciatique à l’étroit dans le trou de conjugaison
transit intestinal ralentissent du fait de la diminu-
(sciatalgies), phénomène accentué par les œdèmes
tion de la motiline sous l’effet de la progestérone.
Ces modifications concourent à une meilleure ab-
La part d’une augmentation des perceptions ol-
sorption intestinale mais créent un état dyspepti-
factive a été discutée dans la genèse des nausées et
que et une sensation de gonflement post-prandial
vomissements : ce phénomène n’est pas retrouvé
au début de la grossesse. En fin de grossesse appa-
raît un reflux gastro-œsophagien, associé à unediminution de pression dans le bas
Manifestations psychologiques
Les modifications de l’état hormonal sont consi-
dérables : l’augmentation des sécrétions de gona-
On divise la grossesse en trois périodes. Premier trimestre : l’ambivalence
En revanche, toutes les théories psychologiques
II se produit une réaction de défense (consciente ou
ou psychanalytiques sont à l’état d’hypothèses et
inconsciente) contre les changements que fait subir
n’ont pas été prouvées par des études contrôlées.
• changement de l’environnement : dans le cou-
Vomissements et nausées
• ambivalence vis-à-vis de la maternité, de la
Ce sont les plus fréquents des petits maux rencon-
place de l’enfant dans la société. Elle peut être
liée à leur propre relation mère-nourrisson fra-
Nous ne traiterons pas les vomissements graves
gile ou à des antécédents personnels ou mater-
dits incoercibles qui nécessitent une hospitalisa-
nels. Ceci est plus souvent exprimé dans les
tion. Ils sont traités par ailleurs (EMC 5-033-A-10).
Mais il y a aussi des réactions positives :
Étiologie, fréquence, évolution et devenir
• réalisation de la féminité, joie de mettre au
périnatal
• dans le couple moderne, ceci se vit de manière
La cause des vomissements gravidiques est incon-
insulaire, le couple se trouve face à face, seul.
nue, ils résultent d’une stimulation excessive du
L’homme est complexé par les responsabilités, il
centre bulbaire du vomissement. Ont été mis en
supporte les petits maux et les troubles caractériels
• un taux excessif des sécrétions de hCG (vomis-
sements plus fréquents dans les grossesses mo-
Second trimestre : l’harmonie
Maturité de la femme qui est mieux dans sa peau.
• des troubles du métabolisme des œstrogènes au
La vie sexuelle, perturbée au début, redevient
normale ; l’utérus est abdominal, le vagin hyperlu-
brifié, les conditions sont idéales.
• un terrain prédisposé somatique (sensibilité aux
médicaments, vomissements faciles, nausées
Troisième trimestre : l’échéance
fréquentes en dehors de la grossesse, faible
La grossesse devient gênante. La femme se trouve à
part dans la vie sociale (on lui laisse sa place assise,
on la ménage.). Des questions surgissent, com-
La plupart des vomissements n’ont pas de sub-
ment se passera l’accouchement, l’enfant sera-t-il
normal ? L’homme se pose des questions sur les
Cependant, derrière ce tableau de vomissements
problèmes techniques : infection, réanimation de
gravidiques de diagnostic trop facile, il faut tou-
l’enfant en cas de mort apparente. La présence de
jours penser aux causes organiques (occlusion, ap-
l’homme est importante car il découvre le mater-
pendicite, infection urinaire, hernie hiatale), ou
Après la naissance, la femme peut devenir indif-
vienne systématique dépiste (môle hydatiforme,
férente au monde qui l’entoure. Elle a une sorte de
sixième sens pour connaître l’état et les besoins de
La fréquence des vomissements est importante,
son enfant. Elle est dans la contemplation : c’est un
en moyenne de 45 à 55 % (69 % dans l’enquête de
état de grâce. Le mari est dans l’action : il prévient
23 % de nausées isolées, 46 % associées
tout le monde, fait la déclaration de naissance, les
aux vomissements). Pour d’autres auteurs, la fré-
quence est de 89 %. Tout dépend de la qualité de
Ceci peut provoquer des troubles de communica-
l’interrogatoire des patientes. Il faut noter que
tion entre mari et femme : l’une est en contempla-
seulement 10 % des patientes nécessitent un traite-
ment actif et que la part des vomissements incoer-
Au 4e-5e jour du post-partum, c’est le petit mo-
cibles ne dépasse pas 1 à 2 % dans les pays euro-
ment de dépression : baisse hormonale mais aussi
sorte d’isolement psychologique. La femme se sentdébordée par ses responsabilités : saura-t-elle faire
Aspects cliniques
Ces données psychologiques sont importantes à
Le début se situe entre 4 et 6 semaines d’aménor-
connaître pour être à l’écoute des couples.
rhée (SA). Il atteint un pic maximal vers 8 ou
12 semaines et la guérison est habituelle vers 15-
possible au début de celle-ci la fréquence et l’im-
17 SA. Les nausées constituent le symptôme le plus
portance des vomisssements est diminuée par rap-
fréquent. Elles sont le plus souvent matinales, se
calmant avec la première prise alimentaire. Par-
aussi la nécessité de débuter le plus tôt possible le
fois, elles s’associent à un ptyalisme.
Dans d’autres cas, elles se complètent par des
vomissements souvent déclenchés par une intolé-
Traitement curatif
rance à certains aliments. a étudié sur une
Les nausées et les vomissements ont le même trai-
population sud-africaine les aversions alimentaires
dans les ethnies blanches, noires ou métisses : le
Deux principes dominent la thérapeutique
taux d’aversion ne varie pas en fonction de l’eth-
nie, mais elle est retrouvée dans 45 à 80 % des cas.
• proportionner le traitement avec l’importance
Elle porte sur des aliments variés : la viande, le
poisson au premier plan, d’autres aliments, tels le
L’arrêt du travail est parfois nécessaire, en par-
thé, le café, et souvent un dégoût pour le tabac. En
ticulier si le déclenchement des nausées et des
revanche, une appétence particulière est notée
vomissements est lié à l’environnement profession-
pour certains aliments, variables selon les groupes
nel (odeurs ambiantes, tabagisme ambiant). L’ar-
ethniques (67 à 84 % des cas). Des phénomènes de
rêt de travail est indispensable si les vomissements
géophagie s’associent dans ces populations mais
s’accompagnent d’intolérance alimentaire totale.
Si les nausées et les vomissements sont simples,
Précautions d’hygiène alimentaire
il n’y a pas de retentissement sur l’état général.
Les repas seront fractionnés (4 à 6 repas) en petites
L’absence de prise de poids est très fréquente dans
quantités, supprimant les aliments qui peuvent en-
les 3 premiers mois de la grossesse. Si des vomisse-
traîner un dégoût pour leur substituer d’autres
ments importants sont associés, l’amaigrissement
aliments. S’il y a dégoût de la viande, on utilise des
peut être plus marqué et même brutal sur plusieurs
protéines animales d’autre origine (laitages, œufs).
jours signant le passage aux vomissements incoer-
Les aliments au goût relevé seront préférés aux
aliments fades. La ration doit rester équilibrée. Il
Les nausées et les vomissements gravidiques sim-
faut éviter les aliments trop glucidiques, ou trop
ples évoluent pratiquement toujours vers la guéri-
chargés en graisse qui entretiennent les vomisse-
son, entre 12 et 18 SA. Leur persistance doit faire
suspecter une anomalie digestive sous-jacente
ment vitaminique doit être utilisé si les rations sont
(hernie hiatale, lithiase biliaire). Des examens
pauvres en légumes crus et en fruits. À l’inverse, il
complémentaires tels que l’œsophagoscopie peu-
faut éviter la boulimie, qui se traduirait par une
vent être faits en dehors de l’échographie hépati-
prise de poids exagérée. Si l’intolérance alimen-
taire est quasi totale le matin, on peut substituer
au petit déjeuner classique des aliments semi-
gravidiques simples sont associés à une diminution
liquides, à base de yaourts, jus de citron, bananes,
du risque de fausse couche dans les premières
œuf et lait aromatisé par un peu de miel. Leur
semaines de grossesse et de mort du fœtus in utero
absorption digestive est rapide et ils n’entraînent
avant 24 semaines (odds ratio : 0,18, intervalle de
pas de diminution de la motricité de l’estomac, en
stimulent la vidange et permettent une bonne ab-
Il n’y a pas d’association avec des malforma-
tions, une augmentation de la mortalité périnatale,un défaut de croissance intra-utérine. Le pronostic
Traitements autres que pharmacologiques
obstétrical est favorable selon la méta-analyse du
Plusieurs études ont montré une diminution de la
fréquence des vomissements en utilisant du gin-gembre en poudre de 250 mg 4 fois par jour, sans
Traitement
De nombreuses vitamines ont été utilisées, mais
Traitement préventif
les évaluations scientifiques de leur efficacité sont
Il n’y a pas de véritable traitement préventif. Ce-
pendant, chez des femmes ayant subi des vomisse-
trent que la vitamine B (pyridoxine) est efficace en
ments importants ou incoercibles lors de précéden-
diminuant de manière significative les nausées sé-
tes grossesses, si le traitement est donné dans les
vères et réduisant l’importance des vomissements.
7 semaines précédant la grossesse ou le plus tôt
Les doses sont variables de 250 mg 3 fois par
à 30 La pyridoxine est souvent associée à
jour (cp à 15 mg) ou comprimés lyoc (7,5 mg) ou en
suppositoire (5 mg) ; elle est moins sédative que les
L’acupuncture, ou l’acupression du point B6 de
Neiguan est efficace (60 % de résultats contre 30 %
Dans les cas plus graves, l’halopéridol en gouttes
par un point de pression autre, faisant témoin de
a été employé. Sa posologie très souple de 1 à
placebo). Ces résultats sont prouvés par plusieurs
de manière empirique n’a pas fait l’objet d’études
et augmente le diamètre pylorique, ses propriétés
antiémétiques seraient plus durables que celles dumétoclopramide et de l’halopéridol ; il n’a pas
d’effets centraux. Il est utilisé en cas de reflux
Les antiémétiques ayant souvent des effets secon-
gastro-œsophagien associé ou en fin de grossesse.
daires il faut proportionner l’inconfort de la théra-
On manque de données contrôlées pour parler de
peutique avec celui des symptômes eux-mêmes.
son efficacité dans les vomissements gravidiques
L’association de la B à la doxylamine 10 mg en
avant 14 SA, en dehors de toute autre affection
renforce l’efficacité. Une étude de cohorte de plus
de 170 000 cas a montré l’absence d’effet térato-
Dans des cas exceptionnels, on a pu avoir recours
Ce médicament non remboursé par la sécu-
à des antiémétiques utilisés en cancérologie, tel
rité sociale peut être prescrit en comprimé effer-
l’ondansétron. Mais on manque de données pour
vescent ou sécable de 15 mg/j. Il a un effet sédatifmarqué et est prescrit de préférence le soir.
Les antihistaminiques antiH , les dérivés de la
L’alizapride a été utilisé aussi avec succès (86 %
phénothiazine sont efficaces et dénués d’effets
de résultats favorables à la dose de 150 mg/j) et
sans effets Il est contre-indiqué en prin-
Le métoclopramide n’est pas contre-indiqué
cipe pendant la grossesse. Par manque d’études
pendant la grossesse et peut être utilisé largement.
prospectives suffisantes, le risque tératogène, qui
Son inconvénient majeur est la somnolence : il vaut
n’existe cependant pas dans les différentes études
mieux le prescrire sous des formes à libération
animales, n’a pas pu être éliminé dans notre es-
prolongée, et le soir au coucher (Anausin métoclo-
pèce. L’alizapride est une molécule proche du mé-
toclopramide, pour laquelle il n’y a pas de données
publiées. Il n’y a eu aucune déclaration de malfor-
du centre du vomissement et une action psycho-
mation dans la base de l’Institut Européen des
trope. Comme le métoclopramide, il favorise la
Génomutations, alors que le produit est commer-
vidange gastrique. Les doses utilisées sont de 100 à
150 mg (cp à 50 mg). Son effet sédatif limite son
Une prise en charge psychologique est souvent
nécessaire ; dans certains cas particuliers, l’en-
La métopimazine est surtout antinausée et peut
quête psychologique dénote une tendance dépres-
être utilisée à la dose de 15 à 30 mg maximum par
Figure 1 Arbre décisionnel. Traitement pharmacologique des nausées et vomissements.
ment antidépresseur adapté est alors nécessaire
Sa fréquence est très grande, surtout dans le
(par exemple, anxiolytique, associé ou non à des
dernier trimestre de la gestation ; des antécédents
antidépresseurs du type clomipramine).
digestifs peuvent être présents (intervention gas-
En résumé, les nausées, phénomène d’inconfort
trique ou biliaire antérieure, affection digestive
très fréquent pendant la grossesse, sont un symp-
antérieure connue, en particulier hernie hiatale). Il
tôme difficile à traiter car la pathogénie en est
existe parfois des antécédents de pyrosis lors de la
incertaine et multiple, d’où des traitements symp-
grossesse précédente. Le plus souvent, on ne re-
tomatiques. Les vomissements requièrent une thé-
trouve rien. Si le reflux est précoce, avant 20 SA, il
rapeutique plus active en raison du risque de désé-
faut suspecter une anomalie digestive préexis-
tante. Le reflux tardif est lié souvent à une hernie
Quant aux vomissements incoercibles, ils sont
Le pyrosis survient plus volontiers en décubitus,
après le repas du soir ou au coucher, la nuit ou en
Ptyalisme
antéflexion : ce sont des brûlures qui remontentdepuis l’estomac le long de l’œsophage jusqu’au
Manifestation mineure ou équivalente aux nausées,
pharynx, accompagnées parfois de régurgitations à
elle peut revêtir un caractère très gênant, pouvant
saveur acide. Elles sont influencées par l’alimenta-
aller jusqu’à une excrétion de salive de 1 litre à
tion à base de mets acides, épicés, de sucres rapi-
Le traitement n’est pas efficace. Il est à base de
Les examens paracliniques n’ont pas d’intérêt,
produits atropiniques qui ont par ailleurs des effets
sauf dans les pyrosis compliqués, rebelles aux thé-
secondaires, dont le plus gênant est la mydriase.
rapeutiques classiques, s’accompagnant de régur-
Mandel a attiré l’attention sur le fait que cette
gitations sanguines. La fibroscopie est alors indi-
hypersialorrhée pouvait être réflexe en présence
d’un reflux gastro-œsophagien, dont le traitementpeut permettre de la réduire (cf.
Traitement Constipation
Les prescriptions diététiques et posturales sont es-sentielles : éviction des boissons alcoolisées, des
Une adaptation du régime alimentaire est utilisée
épices, sauces, condiments, glucides (à action
en premier : régime comportant des fruits crus ou
courte ou à action lente) ; éviter les fritures, le
cuits, des légumes crus ou surtout cuits. Il faut se
café, le thé, et les aliments favorisant la distension
méfier du pain complet, pas toujours bien toléré et
abdominale (haricots, lentilles, boissons gazeuses).
pouvant entraîner un défaut d’absorption de vita-
Les repas doivent être peu abondants, fractionnés.
mines, d’oligoéléments, du calcium et du magné-
Il faut éviter le décubitus, surtout postprandial,
sium. On peut utiliser des laxatifs non irritants pour
recommander de faire une marche après les repas
l’intestin : des mucilages qui agissent par simple
ou se tenir en position demi-assise. Il faut éviter les
effet mécanique, du macrogol qui augmente l’hy-
facteurs d’hyperpression abdominale, du type cein-
dratation des selles. Le lactulose et le lactitol sont
bien tolérés. Les produits à base d’huile de paraf-
Les prescriptions symptomatiques sont des subs-
fine, associée ou non au lactulose, sont efficaces ;
ils interfèrent avec l’absorption des vitamines lipo-
Les pansements œsogastriques ont des effets
solubles, il faut donc limiter leur emploi dans le
suffisants mais transitoires : aux gels de phosphate
temps. Les produits à base de plantes (anthracéni-
d’aluminium on préfère les alginates associés au
ques isolés ou associés) ne sont pas contre-indiqués
bicarbonate de sodium ou à l’hydroxyde d’alumine.
(Tamarine® gélules). En cas de constipation opiniâ-
De nombreuses spécialités qui les associent sont
tre pendant plusieurs jours, l’administration de
proposées, apportant de plus un soulagement pas-
microlavements de gel à base de glycérol (Recto-
sager par l’utilisation d’anesthésique de contact :
panbiline®), parfois associés à du sorbitol (Micro-
lax®) sont les plus efficaces pour obtenir un déblo-
Ces produits doivent être absorbés de préférence
cage ; ceci ne remplace pas le traitement de fond.
après les repas ou au moment des brûlures. Il fautchoisir la forme pharmacologique – suspension bu-
vable, sachet individuel, facile à emporter, compri-més – en fonction du mode de vie. Il faut se confor-
C’est une sensation de brûlure œsophagienne qui
mer aux habitudes alimentaires des patientes. Les
traduit le reflux gastro-œsophagien.
dérivés à base d’aluminium sont plutôt constipants,
alors que les dérivés à base de magnésium ont
traitement par le chlorure de sodium (ClNa) et le
plutôt une action laxative, l’association des deux
calcium relève plus du placebo que de l’action
permet d’éviter les effets sur le transit intestinal.
propre (comparaison du traitement par ClNa et
Tous ces produits sont susceptibles d’interférer sur
placebo : odds ratio 0,54, IC 95 % : 0,23-1,29)
l’absorption intestinale de médicaments, d’oligoé-
comparaison du traitement par calcium et ClNa
léments ou de vitamines. Dans ces cas, l’adminis-
(odds ratio 1,23, IC 95 % : 0,47-3,27). Une a
tration après le repas est préférable.
comparé un traitement polyvitaminique à une sup-
En cas de reflux gastro-œsophagien important,
plémentation en magnésium. Elle conclut à l’inef-
les produits à base d’alginate sont mieux adap-
ficacité du complexe polyvitaminique et à l’intérêt
du traitement magnésique (odds ratio 0,18, IC
Le recours aux anti-H , (cimétidine, raniti-
ou aux inhibiteurs de la pompe à protons
Le traitement symptomatique est efficace : la
[oméprazole]) convient aux formes rebelles ou
durée d’action est limitée à quelques heures : il
s’accompagnant d’ulcérations du bas œsophage. Il
s’agit essentiellement de dérivés de la quinine
n’y a pas de contre-indication à l’emploi de ces
(Hexaquine®) ; aux doses utilisées, il n’y a aucune
En revanche, l’utilisation d’analogues
contre-indication pendant la grossesse, car le trai-
des prostaglandines (misoprostol) est formellement
tement n’engendre pas de contractions utérines
contre-indiquée pendant la grossesse, du fait de
anormales aux doses employées (150 à 300 mg par
prise 2 à 4 fois par jour au maximum).
En résumé, la riboflavine ou l’acide pantothéni-
que associé à une supplémentation en magnésium(400 mg/j 2 à 4 semaines) est à employer commetraitement de fond que l’on complète par la pres-
Ce sont des contractions spasmodiques douloureu-
cription de quinine au moment des symptômes (2 à
ses siégeant surtout au niveau des membres infé-
rieurs. Elles durent de 30 secondes à 1 minute etsont souvent extrêmement douloureuses. Elles sur-viennent surtout la nuit et apparaissent plutôt dansles 3 derniers mois de la grossesse. Elles sont très
Lombalgies
fréquentes (15-30 % des Le moded’apparition est variable : quelquefois déclenchées
L’examen clinique révèle souvent une hyperlor-
par un mouvement, une position anormale du mem-
dose, quelquefois une contracture localisée des
bre inférieur, ou un étirement. La physiopathologie
muscles lombaires. Elles sont très fréquentes et
est pratiquement inconnue, et relève de facteurs
rarement d’origine organique, aucune investigation
variés. On a incriminé entre autres les troubles du
paraclinique n’est nécessaire. La thérapeutique est
retour veineux ou des spasmes artériels.
à base de postures, visant à corriger l’hyperlordose
Leur traitement est empirique, car les études
par un mouvement de mise en avant du pubis. Des
publiées ont une méthodologie critiquable. Une
gymnastiques d’étirement au sol peuvent être effi-
analyse de la Cochrane relève cinq essaisrandomisés de qualité modérée.
caces, la femme étant couchée sur le dos, les
Les traitements de fond proposés sont variés.
jambes légèrement pliées, elle corrige la lordose
Parmi les traitements vitaminiques, la riboflavine
en essayant de sentir l’appui de chaque apophyse
(vitamine B ) serait efficace à la dose habituelle de
épineuse de la colonne lombaire sur un plan dur. Il
4 comprimés par jour. Pour l’acide pan-
faut associer à ceci toutes les mesures de protec-
tothénique prescrit à la dose de 400 mg/j pendant
tion de la colonne lombaire bien connues dans les
10 jours est le plus efficace. Le taux de guérison,
milieux de travail : redressement de la colonne
chez les femmes n’ayant pas de pathologie vei-
lombaire, blocage de celle-ci avant tout effort, par
neuse, atteint 61 %, avec 16 % d’améliorations. S’il
exemple soulever un poids, ou se pencher en avant.
y a une pathologie veineuse, le pourcentage d’amé-
Si ces mesures sont insuffisantes, des massages
lioration est beaucoup plus faible. Le délai d’action
peuvent être prescrits. Le traitement médicamen-
teux est décevant : les décontracturants locaux et
L’association calcium-calciférol donne 32 % de
généraux (tétrazépam) sont inutiles, ainsi que les
guérisons dont 30 % d’amélioration ! Un complexe
antalgiques en dehors du lumbago vrai aigu. La
osséine-hydroxyapatite (Ossopan®) a été jugé effi-
prescription d’uridine (Uteplex®) (3 ampoules par
cace dans 77 % des cas, contre 23 % dans le groupe
jour en cures de 2 à 3 semaines) s’est avérée
Relâchement douloureux des symphyses
abusive de vasoconstricteurs. Les signes disparais-sent spontanément dès l’accouchement. Ils ne né-
II s’agit d’un syndrome très précis décrit par La-
cessitent pas de traitement pendant la grossesse.
comme, en Il survient généralement en fin
Les troubles vocaux sont d’apparition tardive,
de grossesse, a tendance à récidiver d’une gros-
sesse à l’autre. Il est fait d’une douleur symphy-
Le timbre de la voix est altéré, plus rauque. La
saire basse, médiane, irradiant parfois dans la
muqueuse laryngée est hyperhémique, congestion-
racine des cuisses, vers le bas, souvent bilaté-
née. Un repos vocal relatif est conseillé. Cette
est réveillée par les mouvements de torsion du
Les manifestations buccales : les gencives sont
corps dans le lit ; le changement de position du
hypervascularisées avec une tendance œdéma-
décubitus dorsal au décubitus latéral est parfois
teuse, les languettes intermédiaires et la sertissure
difficile. Il peut exister aussi une semi-impotence
gingivale se colorent en rouge vif puis elles sont
fonctionnelle à la marche, avec une démarche en
hypertrophiques, saignant au contact. Cette gingi-vite est maximale vers le 5e mois, et disparaît après
« canard » très accentuée et des douleurs à chaque
pas. L’irradiation se fait rarement en arrière, vers
L’épulis (hyperplasie gingivale localisée) se voit
les sacro-iliaques, pouvant faire suspecter une
dans 1 % des cas, surtout chez les multipares. De
préférence située au niveau du maxillaire supé-
Le traitement médical est décevant : de nom-
rieur, elle a l’aspect d’une pseudotumeur de
breuses recettes ont été données. Le calcium n’est
consistance molle, rouge, saignant au contact. Une
pas efficace, même associé à la vitamine D , l’hy-
intervention locale (ablation, coagulation) n’est
pothèse d’une ostéoporose locale n’a jamais été
que très rarement nécessaire (en cas d’hémorragies
vérifiée. Le traitement le plus efficace est le repos
associé à des antalgiques (paracétamol). Les anti-
Toutes ces manifestations gingivales disparais-
inflammatoires non stéroïdiens peuvent être em-
sent après l’accouchement. Elles ne nécessitent
ployés en cures courtes. Leur prescription doit être
qu’une hygiène buccodentaire attentive. Il faut
limitée dans le temps (pas plus de 5 jours) du fait du
abandonner le brossage au profit du lavage triquo-
risque d’effets fœtaux nocifs (fermeture précoce
tidien par jet dentaire, utiliser des lotions dentai-
du canal artériel). Ceci limite beaucoup leur intérêt
thérapeutique, voire les contre-indique.
Le relâchement douloureux des symphyses guérit
dans les 2 jours qui suivent l’accouchement. Cette
Modifications génitales
pathologie est à distinguer de la disjonction symphy-saire qui ne se voit qu’après l’accouchement, ou de
En dehors des véritables vaginites ou vulvites, on
l’arthrite pubienne qui survient vers le 4e jour.
observe simplement une hyperhémie de la mu-
Ces trois affections sont beaucoup plus rares
queuse vulvaire qui devient turgescente. La vulve
est hypersensible et des prurit vulvaires sine mate-ria très fréquents. Il faut rassurer, éviter d’utiliserdes savons médicamenteux, leur préférer des sa-
Pathologies bénignes ORL
vons légèrement alcalins, voire les supprimer tota-lement. Il faut éviter de penser que prurit égale
La rhinite est liée à une obstruction nasale en
toujours mycose et de prescrire abusivement des
rapport avec la turgescence de la muqueuse. Elle
antimycosiques ou faire de multiples examens bac-
survient surtout dans la deuxième moitié de la
tériologiques la plupart du temps inutiles.
grossesse et disparaît après l’accouchement.
Elle semble coïncider avec un taux élevé de
progestérone. La grossesse peut aussi accentuer les
Modifications cutanées et des phanères
Les corticoïdes locaux semblent donner de bons
Elles sont bénignes et disparaissent après la gros-
résultats. On évite les vasoconstricteurs dans la
Les phénomènes les plus souvent rencontrés et
La béance de la trompe d’Eustache : au cours du
qui ne demandent pas de traitement sont :
dernier trimestre surviennent des autophonies, des
• l’augmentation de la pigmentation cutanée ;
acouphènes, symptômes de cette béance. Ils peu-
• l’hypersensibilité au soleil, du visage surtout, au
vent être aggravés par le stress, ou une utilisation
Vergetures
prend une durée normale, ce qui ralentit leur rem-placement spontané.
Encore appelées striae elles touchent 60 à
Mais il n’existe pas de chute véritable du cheveu
en dehors de problèmes pathologiques ou d’anoma-
En microscopie électronique, on voit une frac-
lies psychologiques sévères. Dans les cas douteux,
ture des réseaux de fibres collagènes parallèlement
le trichogramme peut être intéressant pour vérifier
s’il n’y a pas d’anomalie trophique du cheveu.
Le stade initial lytique est infraclinique, le stade
Une alimentation équilibrée est indispensable
de régénération correspondant aux vergetures rou-
pour un bon équilibre de la pousse et de la chute,
ges lui succède puis apparaît le stade cicatriciel
en particulier apport d’acides aminés essentiels, de
la cystine et des vitamines B (B , B , B ).
Elles sont le résultat de plusieurs facteurs
l’action des estrogènes sur la peau entraîne unestimulation des kératinocytes (pigmentation exagé-
Conclusion
rée), diminution de la sécrétion sébacée (peausèche), vasodilatation cutanée, augmentation de la
Les « petits maux » créent un très réel inconfort
perméabilité capillaire et néoformation vasculaire.
qu’il faut aider à faire supporter, car il n’existe
La progestérone est probablement pigmentogène
aucune thérapeutique spécifique bien déterminée.
et antiandrogène. Les corticoïdes provoquent une
Créer un bon équilibre psychologique, associé à une
diminution de l’activité kératinocytaire, une inhi-
alimentation équilibrée pendant la grossesse, est le
bition du collagène et de l’élastine cutanée.
meilleur moyen de remédier partiellement à ces
Les vergetures sont d’abord violacées puis blan-
ches à partir du 6e mois, mais elles apparaissent
La plupart des traitements sont très empiriques,
parfois plus tôt chez les femmes ayant une prédis-
fondés sur l’expérience des accoucheurs. Ceci
position héréditaire ou une obésité.
laisse la place à de très nombreux traitements dont
On a proposé un traitement topique de lotion à
on ne peut séparer l’effet réel de l’effet placebo. Il
base d’acide glycolique (20 %) associé à de l’acide
serait nécessaire dans la thérapeutique de certains
ascorbique (10 En fait les traitements sont peu
troubles gênants (vomissements, crampes) de re-
faire des évaluations scientifiques qui permet-
Une bonne hygiène de la peau est importante. Il
traient d’éviter de prescrire tout et n’importe quoi.
faut respecter les défenses naturelles de la peau enproscrivant les produits détersifs, en particulier
Références
certains gels de douche. En cas d’hypersensibilitégénérale de la peau, c’est l’abstention totale de
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